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Le débriefing

Nous assistons à une pression très forte sur les missionnaires, pour lesquelles ils n'ont souvent pas étés préparés. Le débriefing est quelque chose d'assez inconnu dans l'église et la mission. Pourtant, c'est le travail minimal que l'on doit offrir à ceux qui travaillent dans notre organisation. Même les Ecritures nous montrent que Jésus a utilisé le débriefing.

Historique du debriefing

Origine : des racines militaires

Du point de vue historique, la notion du débriefing tire son origine du domaine militaire, au cours des deux guerres mondiales. A cause du manque de capacité, seules les équipes de cockpit d'avions bombardiers étaient touchées par ce débriefing à leur retour de mission. On les prenait à part et on leur demandait : qu'est-ce qui a été bien ou mal ? Avez-vous atteint votre objectif ? Comment était la météo ? Comment avez-vous vécu à l'intérieur du cockpit ? Comment avez-vous communiqué avec les membres de l'équipe ? De quel nouvel équipement avez-vous besoin la prochaine fois ? Etc.

Ces équipes sont soudainement apparues aux psychologues comme ayant une meilleure attente de survie que les autres soldats, dans d'autres domaines, et se sont montrées plus efficaces par la suite. Les individus arrivaient à mieux s'en sortir sur le champ de guerre. Leur état mental s'améliorait même. Les pilotes qui ne faisaient pas de débriefing étaient très nombreux à refuser de repartir en mission, ou bien échouaient dans les missions ultérieures.

Dans le monde séculier, le débriefing s'est imposé comme quelque chose de normal dans les différents services d'urgence, après chaque opération d'envergure (police, pompiers, ambulances, etc.) Si les choses ne sont pas correctement gérées, le taux de suicide est particulièrement élevé chez cette catégorie de personnes.

Extension à l'église et la mission

Le triste constat suivant a été fait : un grand nombre de missionnaires ne connaissent pas vraiment leur mission, ils n'ont souvent aucun cahier des charges. L'encadrement et le soutien des missionnaires (appelé « membercare » en anglais) est une discipline qui englobe le débriefing. C'est un potentiel pour bénir, guérir, élever et édifier des dynamiques de mission. Ce domaine est devenu très important et stratégique.

Le but suprême est de conserver le plus longtemps possible les personnes sur les champs de mission et en meilleure santé. Il s'agit de leur donner les moyens de s'épanouir dans l'environnement au sein duquel elles servent Dieu. Ce n'est pas seulement les rendre plus joyeuses, mais le monde se perd, les nécessiteux sont toujours plus nombreux. L'Evangile doit rejoindre tous les coins de la terre, et les conditions sont toujours plus difficiles.

Il y a aujourd'hui une coalition au niveau européen en faveur du membercare pour une meilleure éthique, une redevabilité au sein des structures afin d'en empêcher les dérives autoritaires. Ce mouvement est structuré au sein de l'Alliance Evangélique Missionnaire.

Un concept biblique

Les personnes qui ont suivi Jésus dans son ministère n'ont plus jamais été les mêmes. Cependant, leur « directeur » se fait tuer. Luc 24 versets 13 à 27 /

Et voici, ce même jour, deux disciples allaient à un village nommé Emmaüs, éloigné de Jérusalem de soixante stades ; et ils s'entretenaient de tout ce qui s'était passé. Pendant qu'ils parlaient et qu'ils discutaient, Jésus s'approcha, et fit route avec eux. Mais leurs yeux étaient empêchés de le reconnaître. Il leur dit : « De quoi vous entretenez-vous en marchant? » Et ils s'arrêtèrent, l'air attristé ? L'un d'eux, nommé Cléopas lui répondit : « Es-tu le seul qui, séjournant à Jérusalem, ne sache pas ce qui est arrivé ces jours-ci ? » « Quoi ? », leur dit-il. Et ils lui répondirent : «Ce qui est arrivé au sujet de Jésus de Nazareth, qui était un prophète puissant en œuvres et en parole devant Dieu et devant tout le peuple. Les principaux sacrificateurs et nos magistrats l'on livré pour le faire condamner à mort et l'ont crucifié ? Nous espérions que ce serait lui qui délivrerait Israël mais avec tout cela, voici le troisième jour que ces choses se sont passées. Il est vrai que quelques femmes nous ont fort étonnés, s'étant rendus de grand matin au sépulcre et n'ayant pas trouvé son corps, elles sont venues dire que des anges leurs sont apparus et ont annoncé qu'il est vivant. Quelques uns de ceux qui étaient avec nous sont allés au sépulcre, et ils ont trouvé les choses comme les femmes l'avaient dit ; mais lui, ils ne l'ont point vu ». Alors Jésus leur dit : « O hommes sans intelligence, et dont le cœur est lent à croire tout ce qu'on dit les prophètes ! Ne fallait-il pas que le Christ souffre ces choses, et qu'il tente dans sa gloire ? Et, commençant par Moïse et tous les prophètes, il leur expliqua dans toutes les Ecritures ce qui les concernait ».

Dans ces versets, Jésus débriefe les disciples d'Emmaüs.

Deux personnes dans la confusion et la déception peuvent être remises en question, tristes, ou en colère. Jésus les rejoint et ne commence pas à leur dire des choses le concernant. Sa façon de venir les rejoindre aide ces deux personnes à partager leurs questionnements Cléopas demande même : Es-tu le seul à ne pas savoir ce qui s'est passé ? Jésus ne répond pas à cette question mais demande : Quelles choses ? Qu'est ce que cela représente pour vous ? Qu'avez-vous ressenti ?

Ils marchent environ 1heure 1h30, ce qui est long. Souvent, lorsque les missionnaires rentrent, ils n'ont le temps de partager que les choses bonnes, mais pas leurs déceptions ni leurs tristesses, qu'ils sont obligés de réprimer. Le résultat est alors celui-ci : beaucoup ne retournent pas sur le champ missionnaire, certains jugent, et restent amers. Jésus ici les aide à partager ce qui se trouve dans leur intérieur, avant de se révéler d'une manière nouvelle.

Il est important d'aider les gens à parler, et les écouter. Mais il doit rester une place dans le débriefing où Jésus doit se révéler, et révéler le Père. Dans le jardin de Gethsémané, Jésus a reçu son propre débriefing de la part de l'ange, afin qu'il puisse aller plus loin et passer par la croix.

Objectifs et structure du debriefing

Le débriefing met souvent en lumière des abus, des dysfonctionnements, des offenses, des attentes déçues, des deuils et des pertes, etc. De nombreuses personnes réagissent comme Absalom : elles soupirent avec ceux qui se plaignent, ce qui peut contribuer à la destruction du leadership dans la mission.

Il est important d'être renouvelé et rétabli dans « qui nous sommes » pour pouvoir aider les autres. La redevabilité est essentielle : beaucoup de gens préfèrent rester dans leur coin et faire les choses comme ils l'entendent. S'occuper du personnel missionnaire devrait normalement être fait de façon concertée et planifiée, par des personnes compétentes, au sein de l'œuvre missionnaire, ou par quelqu'un d'extérieur à l'organisation, selon les possibilités et les situations. Un sentiment de sécurité doit être donné à la personne, mais pour que cette sécurité soit véritable, la redevabilité et la confidentialité sont essentielles.

Objectifs :

Marche à suivre

Engager une réflexion

Il s'agit ici de se sentir écouté et compris, vivre des guérisons pour repartir plus fort dans le ministère,.

Différents types de debriefing

Le débriefing peut intervenir pour des gens « sains », qui ont juste besoin d'être écoutés ; mais aussi pour des personnes qui ont des problèmes (burn-out, stress, etc.) ; chez des personnes qui viennent de vivre un traumatisme ou une crise au sein de leur équipe.

Débriefing organisationnel

Au Royaume-Uni, ne pas avoir de service de débriefing dans son organisation minimise les chances de percevoir des aides du gouvernement

Stratégiquement, il s'agit de savoir ce qui a bien/mal fonctionné au sein de l'organisation, concernant le projet ou la phase pratique en question. Ce genre de débriefing est utile, mais il ne touche pas à ce que se passe à l'intérieur de la personne. On ne fait qu'évaluer les objectifs, ce qui est important pour la planification stratégique - ce la donne un excellent sentiment de pouvoir contribuer au développement de l'organisation. Mais le bénéficiaire principal de ce type de débriefing est l'organisation elle-même.

Débriefing de routine ou de base

Après plusieurs semaines ou années passées sur le terrain missionnaire, un besoin de débriefing de routine se fait sentir, c'est tout à fait normal après un voyage missionnaire. Ces personnes viennent pour une évaluation, un bilan, pour s'améliorer. Le débriefing se passe en une semaine, selon un schéma précis.

1er jour

On définit les paramètres de la relation

Les gens partagent, il convient donc de les écouter, de se faire des repères

Pour le soir, définir un thème de réflexion.

Faire une liste de tous les changements, y réfléchir

2ème jour

Partager les changements majeurs (dans tous les domaines) qui influent sur le cours de leurs vies.

Utiliser le modèle de transition

Réfléchir sur les pertes premières et secondaires (elles sont souvent plus marquantes - ex : perte de confiance dans les leaders)

Apport spirituel (Jean 10, 10) sur la stratégie de Satan dans nos vies.

3ème jour

Courbe de deuil. Le danger pour les ministères est de passer directement de l'état de choc à l'aide aux autres en fournissant soi-même toutes les ressources. Il convient de se laisser le temps de passer par les étapes suivantes :

Phase 1 : choc

Phase 2 : désorganisation (pourquoi ?)

Phase 3 : Accepter l'impact du choc, dépression (Jésus est avec moi mais je dois y aller seul, personne ne le peut à ma place)

Phase 4 : Réorganisation, retrouver de nouvelles forces et des relations

Phase 5 : Alors seulement je pourrai aider les autres

4ème jour

Introduire le concept « Jésus porte mes péchés mais aussi mes douleurs » (Esaïe 53 et 61). - Luc 4 - Message de Jean Baptiste -

5ème jour

Temps de prière à la croix. Ministère et actes symboliques.

Débriefing de crise

Il se fait après des évènements traumatisants. Il est plus structuré (demande des outils particuliers) et doit se faire si possible dans les 48h à 72 heures après le choc.

Il a pour but d'aider les gens à parler d'une situation de crise en vue de la guérison. Souvent, la crise est incompréhensible, on n'arrive pas à la « classer » dans notre cerveau.

  1. Chacun parle et décrit les faits tels qu'il les a vécus
  2. Qu'est ce que j'ai pensé à ce moment là ?
  3. Evaluation du niveau émotionnel : qu'est ce que j'ai ressenti pendant, après ?
  4. Etude des symptômes (troubles du sommeil, dépression, colère, stress, etc.)
  5. Formation : Les symptômes sont normaux
    Pour certains, il faut parler de ce qui s'est passé juste avant, il faut alors gérer les émotions
  6. Aborder le futur (peur être une thérapie), voir ce qui ressort du passé.

Débriefing pour membres d'équipe à court terme.

Dans ce cas les personnes qui ont travaillé en mission sont encore dans la phase « ‘lune de miel ». La difficulté sera de monter que tout n'a pas été aussi merveilleux que le ressenti du missionnaire rentrant. A chaque voyage, il est important d'avoir un débriefing car on charge son sac à dos d'un poids supplémentaire durant chaque mission, ce qui pourrait devient de plus en plus lourd (c'est ce qui arrive aux personnes qui font de très courtes missions humanitaires, comme avec MEDAIR).

On n'en ressent pas forcément le besoin, mais la nécessité est là. Au cours des différents missions, on aura affaire aux mêmes personnes, au même stress et il est important de ne pas durcir son cœur face aux évènements et se désensibiliser face à la souffrance, la pauvreté, la santé des expatriés, les catastrophes ou les destructions. Là se trouve le danger.

Débriefing pour membres d'équipe à long terme.

Les personnes qui en bénéficient ont eu une formation plus longue avant de partir. Mais lors des congés ou à leur retour définitif, les amis et les situations ont changé. Là aussi, le danger d'endurcir son cœur est très important (se protéger des au revoir). Les relations avec l'entourage se font rapidement et assez profondément car on ne sait pas combien de temps elles vont durer. Mais le missionnaire risque de s'arrêter à un certain niveau pour se protéger et moins souffrir des séparations.

Ce processus est très important dans la compréhension des enfants de missionnaires (Enfants de Troisième Culture). Dans leur future relation conjugale future, cette démarche d'implication lente peut créer des problèmes. De même, ayant « subi » le choix de leurs parents, les questions d'identité sont encore plus fortes : Qui suis-je ? A qui est-ce que j'appartiens ? Il s'agit d'un vrai combat d'identité, surtout lorsque l'on sait que l'adolescence au Sud est très différente de celle au Nord.

Au retour, les lois aussi ont changé, il faut y être préparé.

Pour certains missionnaires, le retour dans le pays d'envoi signifie un retour à la maison. Pour d'autres, on quitte son pays (d'adoption). Ces différentes dynamiques peuvent se passer au sein de la même famille missionnaire.

Débriefing et relation d'aide

La relation entre le débriefing et la relation d'aide ressemble à la parenté entre le tennis et le badminton. Il s'agit de laisser aux gens le temps de parler de leurs expériences sans sauter sur les symptômes. Il convient alors de savoir ce que Dieu veut faire durant la semaine de débriefing : que la personne écoute Dieu dans la prière ; puis l'envoyer vers des spécialistes ci besoin.

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La question reste : comment aider des missionnaires en une semaine seulement ? On ne peut souvent pas expliquer le comment, mais lorsque Jésus se révèle, les miracles apparaissent. C'est comme lorsque les disciples d'Emmaüs reçoivent le feu et des forces nouvelles pour courir à Jérusalem et répandre la nouvelle de leur rencontre avec Jésus. C'est le but du débriefing : que les gens soient fortifiés par le Seigneur afin qu'ils puissent repartir plein de puissance et de motivation. !